Détective privé, un métier d'avenir

Détective privé, un métier d’avenir ?

Détective privé, un métier d’avenir ? :

Exercer la profession de détective privé, c’est avant tout faire preuve d’un état d’esprit créatif et d’une indépendance qui se caractérise par la mise en œuvre d’un savoir-faire et d’un savoir-être, au service du droit et de la preuve. Aucune formation, si bonne soit elle, ne pourra donc jamais remplacer les qualités intrinsèques de l’enquêteur, à savoir : un sens inné de l’observation, une mémoire aiguisée, de bonnes qualités rédactionnelles, de solides connaissances en droit et une réactivité sans faille, associée à la faculté de se fondre dans l’environnement.

Il s’agit donc d’un véritable sacerdoce menacé par les aléas d’une activité libérale, en proie aux doléances en tous genres d’une clientèle devenue plus rare mais plus exigeante, frileuse par ailleurs quant aux coûts générés par une enquête. Il faut s’y-faire parait-il ! La crise est passée par là. L’obligation de conseils et de moyens s’impose toujours à l’enquêteur privé et l’admissibilité de ses rapports dépend de la licéité des preuves recueillies.  Véritable équilibriste que celui du rôle endossé par l’agent de recherches puisqu’il instrumente entre la charge de la preuve et le nécessaire respect au droit de la vie privée d’autrui.  Sans passe-droit bien sûr, exceptées les quelques sources ouvertes non encore impactées par le RGPD. Son travail commence où celui des autorités répressives s’arrête et selon la nature des investigations à effectuer, le cadre juridique varie. Les affaires d’hier ne sont plus comparables à celles d’aujourd’hui, dans une ambiance teintée d’inquiétude. Car oui, admettons-le, les dossiers sont beaucoup moins nombreux et surtout moins rémunérateurs qu’autrefois.  Pourtant, les contentieux sont bien présents et à défaut de pouvoir régler le litige à l’amiable, le recours à l’investigateur tend à s’amenuiser. A l’exception des enquêtes d’assurances, un secteur couru par bon nombre de praticiens. En 2014, un célèbre quotidien régional sous-titrait déjà : « Mille deux cent agences de moins depuis 2000 ». Ceci pour expliquer que « la crise économique nous fait aussi souffrir car elle réduit nos activités et donc nos effectifs » (1).

détective privé, un métier d'avenir ?Qu’en est-il donc de cette profession qui rappelons-le, s’est développée au cours du 19ème siècle ? Autrefois dénommé agent d’affaires, activité mentionnée à l’appendice du code pénal, le professionnel de « recherches privées », déclaré alors en Préfecture, traitait divers dossiers liés aux risques commerciaux. Une manne rendue possible par « la complexité croissante des structures économiques, l’accroissement de la production et de la valeur des biens et l’accès plus massif à la propriété » (2).  Aujourd’hui, la société est en crise et l’économie régresse.  On assiste à un renversement des valeurs, une multiplication des plans sociaux, des mouvements de violences exacerbées et une recrudescence d’infractions diverses. La profession a évolué mais la législation s’est durcie, à travers notamment l’émergence de nouveaux textes ou la réforme de certains d’entre eux (CEDH, CNIL, Code Pénal, Code du Travail, …). La protection de la vie privée s’est donc renforcée, à tel point que l’enquête et la surveillance, cœur de métier des détectives, doivent aujourd’hui être traitées avec encore plus de prudence, y-compris les clichés photographiques. Quant aux nouvelles technologies, elles se révèlent souvent être des outils piégeux dont l’utilisation peut être sanctionnée. Le prix à payer, pour exercer une profession indépendante, réglementée certes mais non répertoriée dans la catégorie des auxiliaires de Justice.

Enfin, force est de constater que la profession ne jouit pas du crédit tant espéré à ses débuts. Son accès, bien que soumis au Code de la Sécurité Intérieure et strictement encadré par le Conseil National des Activités Privées de Sécurité (CNAPS), ne suffit pas à redonner confiance. A tel point que certains hommes de robes hésitent, voire déconseillent l’intervention d’un détective à leur client. Qu’il s’agisse de raison d’éthique ou de raison financière, peu importe. Le résultat est là. Pourtant, tout comme l’avocat, le détective concourt à la « défense des intérêts » de son client et les tribunaux, toutes juridictions confondues, accordent paradoxalement un regard bienveillant aux rapports d’enquête privée. Une reconnaissance qui ne date pas d’hier, si l’on tient compte du célèbre arrêt GARNIER, rendu le 7 novembre 1962, par la chambre civile de la Cour de cassation. Alors, à qui la faute ? A en croire Marie-Françoise HOLLINGER, présidente du Conseil National Supérieur Professionnel des Agents de Recherches Privées (CNSP-ARP), « les médias et la télévision ont déformé l’image de la profession (…) » (3). A tel point qu’un sondage du 14 octobre 2017, publié dans le quotidien régional « Le Maine Libre », révèle que sur 496 personnes interrogées, soit 55% d’entre elles (275 votes) ont déclaré ne pas faire confiance aux détectives privés !

Une défiance peu justifiée, si l’on oppose les conditions rigoureuses d’accès à la profession (aptitude, incompatibilités, formation, déontologie) à la situation actuelle de la société, émaillée de maux tels que le manque de moyens, ou de volonté ou encore le manque d’effectifs observé dans l’administration. Pendant ce temps, quid de la fraude sociale et des trafics en tous genres ? L’Etat est dépassé et surtout dans l’incapacité de faire face à tout ce chaos, quoiqu’on en dise. Les médias nous le rappellent régulièrement. Le métier de détective privé n’est-il pas alors un des instruments permettant de participer au contrôle social ? Oui, répond Gabriel DUMENIL, avocat, ancien secrétaire de la Conférence : « le rôle de l’enquête privée est déterminant (…) »  Un outil qu’il conviendrait d’exploiter davantage, quitte à heurter certaines susceptibilités car « il en va tant de la cohérence du système que du respect des droits des justiciables et de l’effectivité des décisions de justice » (4).

Alors, Détective privé, un métier d’avenir ?

 Pascal BONNET
Agent de Recherches privées
Administrateur du CNSP-ARP
+33 660 662 501
Lui écrire

(1) Le Républicain Lorrain, « Les détectives privés disparaissent », édition de Nancy, le 22/05/14.

(2) Naissance de la police privée, Dominique Kalifa, éditions Plon, mars 2000, p.18.

(3) Le Républicain Lorrain, « N’est pas détective qui veut » édition de Saint-Avold, le 18/09/15.

(4) « La nécessité de réformer l’activité d’agent de recherches privées », LEXISNEXIS S.A, Etudes – DROIT PENAL, n°3 – Mars 2023, p.8 et 11.

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